
« Arrêtons de traiter la planète comme des toilettes ! », s’est emporté Antonio Guterres, le secrétaire général des Nations unies, en ouvrant les débats de la conférence sur le climat de Glasgow, la COP26, ce lundi 1er septembre. Pour lui, c’en est assez de brûler, de creuser et de forer la terre à la recherche de combustibles fossiles. « Nous creusons nos propres tombes », a-t-il ajouté.
Our addiction to fossil fuels is pushing humanity to the brink. It’s time to say: enough. Enough brutalizing biodi… https://t.co/CoN40Qehjy
— antonioguterres (@António Guterres)
Vérité à Glasgow, réalité au-delà. La veille, le premier producteur mondial de pétrole, la compagnie saoudienne Aramco a confirmé son intention d’accroître singulièrement sa production d’or noir. Elle va investir 35 milliards de dollars pour passer sa capacité de 12 à 13 millions de barils par jour. Le monde est encore assoiffé d’huile fossile, et particulièrement en ces temps de pénurie énergétique. Le prix du baril s’envole au-dessus des 80 dollars, quatre fois plus qu’aux pires moments de la crise sanitaire au printemps 2020.
Un paradoxe bien connu
Champagne à Riyad où Saudi Aramco est redevenue l’entreprise la plus profitable du monde. Sur le dernier trimestre, son bénéfice net s’est envolé à plus de 30 milliards de dollars, soit 158 % de hausse par rapport à 2020. Une aubaine aussi pour l’Etat saoudien dont la ressource principale pour boucler un budget en déficit est de ponctionner sa filiale chérie, dont les bénéfices sont taxés à 50 % et qui touche de surcroît l’essentiel des 75 milliards de dollars de dividendes que verse chaque année la compagnie nationale à ses actionnaires. On comprend que la monarchie saoudienne, qui avait nationalisé l’entreprise en 1980, l’arrachant à ses protecteurs américains, garde précieusement 98 % du capital de son entreprise, laissant le reste évoluer tranquillement à la Bourse de Riyad.
Cette réalité nous renvoie à un paradoxe bien connu. Le moyen le plus efficace pour réduire les émissions de gaz à effet de serre est que le prix des combustibles fossiles soit élevé et conduise les acteurs économiques et politiques à économiser ou à trouver d’autres solutions.
Un baril à plus de 80 dollars envoie un signal imparable sur toute la chaîne économique, du simple chauffage au fuel à la fabrication de voitures ou de jouets pour Noël, en passant bien sûr par les transports et le BTP. Un effet équivalent à une taxe carbone.
Avec une seule différence. Dans le cas de la taxe, l’argent collecté peut être redistribué pour atténuer les effets de coût sur le pouvoir d’achat des ménages, tandis que, dans le cas présent, il ne sert qu’à renflouer les caisses d’oligarchies pétrolières dont les préoccupations sont bien loin de celles qui travaillent les esprits en ce moment, à Glasgow.